Recherche clinique et dermatologie – « Il faut oser ou se résigner à tout ! »

Mai 9, 2024

Même en 17 avant J.C., TITE LIVE nous donnait déjà l’exemple…

Pour moi, tout a commencé par hasard : un ARC, attaché de recherche clinique est venu (il y a plusieurs décades) au cabinet pour me proposer de participer à une étude clinique portant sur un nouvel antibiotique de phase 3.

Il fallait être folle, mais j’aurais pu regretter de ne pas foncer. Il a fallu se retrousser les manches et TOUT apprendre seule. Malgré les difficultés rencontrées, ce fut le déclic.

Découvrir, apprendre, connaître, se perfectionner, participer et se faire plaisir : l’essentiel.

Au début, seule avec ma secrétaire tant les contraintes de la recherche clinique étaient moins exigeantes qu’aujourd’hui, nous avons travaillé et travaillons encore en équipe élargie une très grande matinée par semaine pour voir les patients. Cela implique la préparation en amont des dossiers pour moi et des kits et commandes de laboratoire pour les deux infirmières dédiées qui ont besoin de la carboglace, des boîtes d’expédition et de la venue des coursiers : DHL, UPS…

J’ai vite décidé de tout réaliser en cabinet : examens, signes généraux, électrocardiogrammes, examens respiratoires, bilans sanguins avec leur technicage tel que la centrifugation, l’incubation, l’expédition, le stockage en congélateur avant envoi pour certains prélèvements, les prélèvements cutanés, salivaires, de matière fécale…

Le fait de tout réaliser en circuit fermé permet un meilleur contrôle et évite le déplacement des patients au laboratoire. Seul l’examen radiologique était effectué à l’extérieur).

Rien ne peut se faire sans une grande collaboration de l’équipe formée par moi en tant que PI, d’un dermatologue à la retraite travaillant maintenant en mutuelle qui est sub-investigateur, de ma secrétaire qui est ma study-co et de quatre infirmières libérales (comme il y a souvent de l’aveugle et de l’ouvert). Nous avons deux infirmières à chaque fois, leurs back-up et un généraliste appelé en renfort pour certaines études aux besoins spécifiques.

« Cette équipe est soudée, formidable et les jeudis nous sortent de la routine quotidienne. »

Nous participons à des phases 2 et 3 pour des pathologies telles que le psoriasis, la dermatite atopique, l’eczéma des mains, le vitiligo, la maladie de Verneuil …

Il faut des locaux spacieux avec des salles séparées pour les nécessités de l’aveugle, de l’ouvert, pour les appels, pour la distribution et pour les examens.

Le matériel est fourni par les sponsors mais il faut stocker les réfrigérateurs, les congélateurs à -40° et -80°, les électrocardiogrammes, les centrifugeuses réfrigérées ou non, les incubateurs, les kits de prélèvements, les documents d’envoi…

Il y a également la nécessité de placards sécurisés pour les traitements locaux et les dossiers sans oublier les ordinateurs et les imprimantes.

Cela peut paraître lourd, mais il faut être très organisé et équiper une salle avec un plan de travail pour le technicage : mais nous y sommes arrivés !

« Ne pas reculer devant le travail est la première règle. »

Une aide avec des ARC à domicile est cependant possible. Mais j’ai préféré m’occuper de rentrer les données dans l’e-CRF car l’expérience m’a appris qu’avec un ARC extérieur, il était préférable de recontrôler les données et de lui expliquer beaucoup de données médicales, ce qui revient à perdre du temps.

Dernier point important, en libéral il faut s’occuper des factures à adresser au sponsor et répartir ensuite les gains entre les différents intervenants.

« Que cela ne vous fasse pas reculer, il faut simplement savoir à quoi s’attendre avant d’agir ! »

En revanche, pour nous, la journée de recherche est un moment « béni » , certes nécessitant rigueur et concentration mais avec des rapports privilégiés avec les patients, heureux de bénéficier de traitements en avant-première, de participer à la recherche pour les prélèvements pharmacogénétiques, venant spontanément avec le sourire et sans récrimination.

Nous avons la sensation d’être vraiment utiles, la satisfaction d’avoir les traitements bien avant leur mise sur le marché, de les connaître parfaitement et ainsi de pouvoir les prescrire ultérieurement et surtout de constater le bonheur des patients lorsque leur qualité de vie, leur vie, leur rapport au travail, à la famille et à eux-mêmes sont améliorés. Nous participons à la recherche et sommes une pierre (modeste) de l’édifice avec une implication dans les publications.

Il ne faut pas perdre encore du terrain, laisser ce travail aux mains de non-dermatos. La spécialité s’est déjà assez effritée et nous nous laissons dépouiller : l’allergologie, la cancérologie, la médecine interne et maintenant les pharmaciens…

YES WE CAN – non : OUI, NOUS LE POUVONS !

Mireille RUER

Dermatologue et vénérologue impliquée en recherche clinique

Cabinet Medical le Bateau Blanc, Martigues

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